Reprise d’une entreprise familiale

Bonjour à tous,

Mon oncle, avec qui je travaille depuis 13 ans, m’a proposé de me céder son entreprise(c’est une petite entreprise, très saine, spécialisée dans la maçonnerie, qui fonctionne avec 5 personnes et 4 véhicules). La reprise peut se faire dans quelques années (2-3 années avant la retraite de mon oncle) mais j’aimerais connaître les risques, difficultés et la procédure liées à cette opération, ainsi que vos conseils.

Je vous remercie d’avance

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Bonjour Louis

Je trouve cela bien d’avoir abordé cette question bien à l’avance. Oui, cette forme de reprise peut être source de conflits.

En effet, souvent, le poids de l’héritage familial peut s’avérer lourd. L’héritier repreneur doit garantir à la fois :

  • la pérennité de l’affaire familiale,

  • la fructification de l’œuvre de la génération précédente

  • une passation pacifique du pouvoir

  • l’adaptation des salariés et partenaires de l’entreprise à la nouvelle direction

D’autres part, la reprise d’une entreprise constitue une transmission de pouvoir et de propriété. Ainsi, il peut y avoir d’autres héritiers qui détiennent une partie du capital mais ne veulent pas exercer le pouvoir. Cette situation peut être source de conflit car les objectifs de chacun peuvent différer : réaliser des investissements dans l’entreprise ou percevoir des dividendes ?

Pour toutes ces raisons, toutes ces questions doivent êtrepensées et abordés avec les parties concernées longtemps à l’avance.

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Comme l’a bien précisé @Tpellerin , les difficultés rencontrées se situent majoritairement sur le plan psychologique et sont liées aux personnalités du cédant et du repreneur.

Ainsi, l’héritierrepreneurdoit d’abord penser à gagner la confiance des salariés, des clients et des partenaires avec qui il va travailler. Les salariés les plus anciens ont tendance à mettre en doute les compétences du nouveau manager surtout s’il décide de modifier les méthodes habituellement pratiquées. En bref, ce dernier doit imposer son autorité dans l’entreprise pour pouvoir prendre les commandes dans de bonnes conditions.

Cela dit, cette transmission recèle également de sérieux atouts sur tous les plans :

  • Sur le plan économique : dans le cas des entreprises familiales, les relations entre cédant et repreneur étant fondées sur la confiance et la loyauté, le chef d’entreprise actuel (le cédant) est soucieux de laisser à son successeur une entreprise opérationnelle et en bon état. Ainsi, les investissements nécessaires au développement (ou au maintien) de l’activité de l’entreprise ont souvent été réalisés avant la transmission.

  • Sur le plan social : un lien étroit existe entre la propriété de l’entreprise et sa gestion, créant une cohérence forte entre ces deux pôles et facilitant la perpétuation des valeurs et des traditions familiales.

  • Sur le plan financier : et quelle que soit la forme de la retenue pour la succession (donation ou cession), la transmission se fait en général dans de bonnes conditions au regard de la situation du cédant comme du repreneur :

  • En cas de cession (rachat de parts) :

  • Le prix de cession est généralement adaptée à la situation financière de l’entreprise et aux possibilités de financement du repreneur

  • Les conditions de financement sont plus souples notamment grâce au crédit vendeur familial

  • La vente d’une entreprise individuelle ou d’une branche complète d’activité est exonérée des plus-values de cession si elle s’effectue lorsque le dirigeant fait valoir ses droits à la retraite dans les 2 ans précédant ou suivant la cession.

  • En cas de donation des biens professionnels aux futurs héritiers, de nombreux allègements fiscaux réduisent les droits de succession dus par ces derniers :
  • La donation est exonérée des plus-values professionnelles si l’exploitation est poursuivie pendant 5 ans minimum après la date de la transmission et si elle est transmise dans son intégralité, stock compris.

  • Le pacte “Dutreil” permet un abattement de 75 % sur les droits de succession ou de donation après signature d’un engagement collectif de conservation des titres et un engagement individuel de 4 ans.

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Si vous envisagez de reprendre l’affaire familiale, voici mes conseils pour vous :

  1. Même si vous travaillez dans l’entreprise depuis plusieurs années, la transmission ne doit pas se réaliser dans la précipitation. Profitez de la période précédant la transition pour suivre éventuellement une formation à la reprise, ou au rachat progressif des parts, etc. Essayez de vous familiariser avec l’environnement externe de l’entreprise (fournisseurs, partenaires, chaine d’approvisionnement) en plus de l’environnement de travail quotidien, lequel vous connaissez déjà.

  2. Ne cédez pas à la pression familiale et ne vous lancez pas dans un tel projet si vous ne vous sentez pas l’âme d’un dirigeant.

  3. Prévoyez de rédiger un “protocole familial” arrêtant les règles qui régiront les relations futures entre la famille et l’entreprise

  4. Il est impératif de consulter longtemps à l’avance notaire et conseillers patrimoniaux et de ne pas hésiter à s’appuyer sur l’avis d’un avocat du droit des affaires pour décider du mode juridique de reprise (donation, vente, apport à une holding) qui peut être lourd de conséquence sur le plan fiscal

  5. Veillez à ce que la reprise soit largement anticipée : le dirigeant actuel doit commencer à déléguer ses pouvoirs, à rassurer les salariés en les tenant régulièrement au courant de l’avancée du projet et en leur expliquant votre stratégie.